« Étaient-ils donc modérés ceux qui votaient chaque année plus d’impôts que la nation n’en pouvait supporter ? ceux qui ne trouvaient jamais les contributions assez lourdes, les traitements assez énormes, les sinécures assez nombreuses ? » – Frédéric Bastiat, Aux électeurs du département des Landes, Novembre 1830.

Max, Hyper, Ultra

Parmi les discours proclamés antilibéraux, on retrouve l’idée fixe que ce qu’ils dénomment « l’ultra-libéralisme » serait une violence consciente entretenue par des individus extrémistes à l’encontre de la sagesse des entités collectives et des institutions sociales en particulier.

On retrouve ces discours notamment dans des nombreux écrits de l’élite intellectuelle, qui a souvent ce penchant à identifier le libéralisme avec l’instauration d’un monde darwinien où les dominants de ce monde rechercheraient toujours sans pitié la maximisation du profit individuel dans une logique d’exploitation sans limites. D’où le qualificatif « d’ultra ». Ce front d’attaque est devenu de plus en plus intense avec des exercices de rhétorique multiples et variés.

Ultra

Le Libéralisme Peut-il Être « Ultra » ? – Nuage de mots.

Dans cette forme de pensée, nos plus chères valeurs occidentales, qui seraient l’universalisme, l’égalitarisme démocratique et le collectivisme des peuples, se trouveraient menacées par un danger majeur. Ce danger est représenté de manière extrême pour convaincre de sa puissance maléfique : « l’ultra-libéralisme », sauvage et à outrance. Un méchant hors-la-loi est recherché, mais quelle est donc la récompense de sa capture ?

Valeurs libérales

Les principales valeurs du libéralisme sont de cette façon caricaturées en Mal Absolu : les échanges pacifiques et volontaires, l’axiome de non-agression, le respect de la propriété légitime, et même la liberté de penser sont tenues comme responsables de la dégradation du monde. Un monde idéalisé dès le départ par ces accusateurs. Le libéral est donc vu comme un sauvage, adorateur du culte du marché pur et parfait, les libéraux comme une minorité de riches aisés, endoctrinés par la main invisible d’Adam Smith.

Les tenants de cette thèse, qui se définissent comme modérés, sont très loin de se soumettre à la logique et à la raison, qu’ils réclament pourtant de tous leurs vœux. Leur principale préoccupation, c’est l’augmentation du pouvoir politique, donc de la coercition et de l’usage de la violence de l’État.

Ennemi

Méchant Ultra-Libéralisme.

De son côté, le libre-échange est-il une forme déguisée de violence ? Chacun est libre de disposer de ses facultés et biens. Est libre et volontaire tout moyen d’action légitime sans violence ni emploi de la force. La force n’étant légitime que pour nous défendre de la violence agressive. La liberté des échanges ne porte donc atteinte à personne justement parce que l’échange est libre.

Si j’échange, par exemple, 3 moutons contre 100 kg de riz, c’est non seulement dans l’intérêt uniquement des parties mais aussi parce que mes 3 moutons ont moins de valeur pour moi que les 100 kg de riz. Cette loi s’applique également dans le sens de mon partenaire qui, lui, attache plus de valeur à mes 3 moutons. Tout ceci n’est que la base première de l’échange libre, sans compter avec les facteurs de préférence temporelle. Ceci n’est qu’une façon simple d’expliquer l’échange et on peut s’apercevoir qu’aucune violence ni aucune forme de manipulation n’a été exercée.

Jamais trop libre

Il importe aussi de se rendre compte qu’en matière de liberté, il n’est jamais trop excessif de défendre certains principes de bon sens. Ainsi, se défendre contre l’invasion de l’interventionnisme arbitraire dans nos vies privées est sans doute la forme d’extrémisme la plus saine qu’un humain raisonnable puisse exercer. Aucune confusion des rôles n’est possible et celui qui défend la liberté à l’extrême le fait pour des motifs moraux et humains. De l’autre côté, celui qui défend l’ingérence étatiste dans la vie privée ne peut aller jusqu’au bout qu’en employant la violence politique.

L’interventionniste juge nécessaire cet emploi de la force, mais nécessaire pourquoi et jusqu’à quel point ? Je doute que l’interventionniste sache répondre avec cohérence à ces questions que lui-même ne se pose pas ou très rarement de façon profonde. Il n’y a de même aucun sacrifice des intérêts dits collectifs au nom de la recherche du profit. Et il est même plus facile de démontrer, au contraire, que des intérêts individuels sont souvent sacrifiés et anéantis au nom d’un groupe de personnes qui proclame avoir le monopole des intérêts collectifs !

Nuls

Pour et par les nuls.

Tout groupe, ou « collectif », n’est qu’un rassemblement de personnes et un groupe ne peut avoir d’autres droits que résultant des droits des individus qui le composent. C’est ainsi que la philosophe Ayn Rand a su voir que les groupes, même majoritaires, n’ont pas le droit de supprimer les droits des êtres singuliers qui composent la société civile.

Extrême non violence

La morale du libre-échange et de la concurrence repose sur des principes simples, seuls ceux qui sont en situation d’échange sont en mesure d’évaluer ce qu’ils échangent, sans contrainte ni violence. Les seules situations « extrêmes » sont justement celles de violation des axiomes qui régissent la liberté des échanges et la propriété légitime et privée.

La morale du libre-échange est à redécouvrir tous les jours et malgré les efforts de certains esprits qui cherchent, à tort, des boucs émissaires, cette morale-là est la forme la plus cohérente de défense de la propriété légitime de chacun. Il en va de même pour la dignité humaine, qui sort renforcée d’un système de liberté des échanges et de propriété privée, dans le cadre de règles de droit.

Peu importe le nom qu’on donne au libéralisme, sa philosophie du droit est la plus complète qui puisse exister en matière de protection des minorités opprimées par la bêtise des majorités. N’est jamais trop extrémiste celui qui lutte contre la concentration de pouvoirs qui anéantissent ces mêmes minorités, les individus humains.

Couverture de Libres !

 

Sandro Da Silva, in Libres !, 2012