« Aucun pays n’est plus paisible et n’offre une meilleure police que ceux où la nation est armée. » – Comité de rédaction de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen
Droits Naturels
La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 comprend l’article 2 qui cite des droits naturels et imprescriptibles : la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l’oppression. Inscrite au préambule de notre Constitution, elle en fait partie intégrante. Elle illustre le paradoxe qui a vu, au cours de l’histoire, le précieux équilibre entre ces quatre droits fondamentaux systématiquement violé. Mais qu’est-ce que la défense personnelle ?
Elle englobe la faculté d’un individu lambda à protéger son intégrité physique, celle d’autrui, et ce qu’il a acquis – sa propriété – par tout moyen légitime. Empêché de protéger le v(i)ol de sa propriété, on n’en est de facto plus propriétaire. Privé de son statut de propriétaire, acquis par son labeur (ou celui de ses aïeux), on est de facto un esclave. Ce v(i)ol peut-être commis par une personne physique ou morale. Historiquement, la personne morale qui a méthodiquement privé des populations entières de leur liberté et de leur propriété est l’État.
Paternaliste, l’État se réserve le monopole de la violence au motif qu’il « saurait » ce qui est bon pour nous. Il néglige ainsi le droit naturel de résistance à l’oppression. Les États devenus régimes totalitaires ont tous, sans exception, commencé par réduire, puis confisquer, l’accès aux armes du citoyen. La légitime défense (« LD » plus bas) existe pourtant dans ce pays.
Conditions de légitime défense
On constate que le Code pénal prévoit à l’article 122-5 une cause d’irresponsabilité pénale ayant pour effet d’empêcher la responsabilité légale de l’auteur d’une infraction ayant un caractère légal, matériel et moral indiscutable. Ledit Code prévoit cependant six conditions draconiennes à celle-ci : l’agression contre soi-même ou autrui doit être actuelle, injustifiée, réelle et la défense face à cette agression doit être nécessaire, simultanée, et proportionnelle.
Contrairement à la légende, la proportionnalité s’apprécie au niveau de la létalité des moyens utilisés : il est donc légalement possible de répliquer avec une arme à feu face à un agresseur équipé d’une arme blanche, d’un marteau. On conviendra qu’il est délicat pour un citoyen d’apprécier en un quart de seconde si l’objet soudain brandi par un agresseur peut nuire à son intégrité physique. La loi pêche par son manque de recul, le magistrat appliquant des conditions en soi inapplicables, et la justice montrant ainsi un sérieux penchant à l’injuste.
C’est la condition de nécessité qui semble gênante : ayant été sur-interprétée par nombre de magistrats ayant fait jurisprudence, elle oblige le citoyen à ne pas se défendre s’il peut éviter le conflit, au mépris du droit naturel et constitutionnel. Ajoutons que la LD ne légitime l’homicide qu’en cas de défense de personnes physiques et non lors de la défense des biens.
À noter que la présomption de LD n’existe que lorsqu’il s’agit de repousser de nuit l’entrée par effraction, violence ou ruse dans un lieu habité, ou de se défendre contre les auteurs de vols ou de pillages exécutés avec violence (art. 122-6 du Code pénal).
Jurisprudence
La jurisprudence française est venue aggraver cela. Par arrêt, toute défense doit être exercée non seulement de façon volontaire, logique du texte pénal, mais de manière que les résultats soient conformes à l’intention. Donc, toute tentative de réclamer la LD en cas d’homicide par arme non-létale (à bannir pour lui préférer « moins létale »), telle que le fameux Gom-Cogn, est vouée à l’échec : la LD sera refusée au motif que l’intention de donner la mort n’est pas probante au vu de « l’outil » utilisé, et qu’il s’agit par conséquent d’un homicide involontaire.
L’homicide volontaire se jugeant en cour d’assises, on peut espérer la clémence du peuple souverain pour l’accusé de bonne foi. Il s’agit néanmoins d’un pari 50-50, entre un verdict de LD et l’homicide volontaire, lequel peut entraîner jusqu’à 20 ans de réclusion. Réfléchissez donc bien avant de crier « je ne l’ai pas fait exprès ! » devant les forces de l’ordre…
Il serait pourtant tellement plus simple d’en revenir aux fondamentaux.
Histoire de Révolution
Dans le cadre de l’examen du projet de DDHC, Mirabeau avait proposé que soit adopté l’article X suivant : « Tout citoyen a le droit d’avoir chez lui des armes et de s’en servir, soit pour la défense commune, soit pour sa propre défense, contre toute agression illégale qui mettrait en péril la vie, les membres ou la liberté d’un ou plusieurs citoyens ». Les membres du Comité des cinq ont considéré à l’unanimité que dans l’article X « le droit déclaré était évident de sa nature, et l’un des principaux garants de la liberté politique et civile… »
De plus, les membres du Comité des cinq ajoutèrent « qu’il est impossible d’imaginer une aristocratie plus terrible que celle qui s’établirait dans un État, par cela seul qu’une partie des citoyens serait armée et que l’autre ne le serait pas ; que tous les raisonnements contraires sont de futiles sophismes démentis par les faits, puisque aucun pays n’est plus paisible et n’offre une meilleure police que ceux où la nation est armée. »
Évident de sa nature… 225 ans après la rédaction de ce texte fondateur de nos droits les plus chers, alors que les citoyens n’ont plus aucune confiance en l’État ni en ses représentants pour garantir leur « sûreté », qu’ils n’ont aucun moyen de « résister à l’oppression » autrement que par la fuite, que l’absence de cet article ne s’est-elle jamais fait aussi cruellement sentir !
Défense à la lampe-torche
Il est une erreur fondamentale de croire que l’être humain mettra sa survie, ou celle de ses proches, en péril à cause d’un texte. Ne faisant que passer d’honnête citoyen au statut de criminel malgré lui, son instinct de survie prévaudra, et tous les textes liberticides du monde n’y pourront rien changer. L’homme se défendra pour protéger ce qu’il est ou aspire à devenir : un individu en paix. Et pour avoir la paix… on connaît la suite…
De façon pragmatique, en France le port ou transport de toute arme est interdit sans motif légitime (licence sportive le plus souvent), lequel motif reste à l’appréciation arbitraire de la police. Il en va de même pour l’interdiction du port et transport des couteaux, objets contondants divers et même des simples bombes lacrymogènes. La détention de bombes lacrymogènes de plus de 100 ml est même désormais interdite à domicile.
Qu’on se demande un peu quel est le but poursuivi par notre cher, très cher État !
Ainsi, dans la France du XXIe siècle, il n’est possible de porter ou de transporter légalement pour se défendre qu’une… simple lampe-torche ! Terrible destin pour le pays qui abrita pourtant les Lumières qui consacrèrent nos droits naturels les plus fondamentaux…
Luc Astier, in Libres !!, 2014