« D’après tous les principes de la morale la plus universelle, le fait d’exiger de certains citoyens un impôt qui ne soit pas pensé et calculé comme le paiement de services rendus par l’État – le fait, donc, de prendre à certains hommes le fruit de leur travail et de leur propriété sans contrepartie – s’appelle un vol. » – Philippe Nemo, 2001
Alors on a pris impôt…
TVA, IRPP, CSG, CRDS, TIPP, IS, ISF… autant de sigles obscurs – certains déjà disparus – qui désignent une même réalité constituant la pierre angulaire du système économique et social dans lequel nous vivons : l’impôt.
La multiplicité des impôts s’accompagne d’une très forte pression fiscale marginale exercée sur les citoyens : sur 100 euros produits en France en 2010, plus de 50% étaient prélevés par l’État. [1] [2] Pourtant l’idée d’imposer les individus, afin de gérer à leur place les revenus tirés de leur labeur, est relativement récente dans nos États modernes.
Par exemple, l’impôt sur le revenu – un des plus injustes puisqu’il pénalise les plus laborieux – n’a été mis en place qu’en 1914 après de nombreux débats polémiques, la guerre justifiant toujours l’accroissement du rôle de l’État. De nos jours, face au déficit abyssal engendré par notre social-démocratie dépensière, les impôts poussent comme des mauvaises herbes dans un jardin mal entretenu pour aller nourrir l’irresponsabilité de nos dirigeants politiques : l’IGF en 1982, la CSG en 1990, la CRDS en 1996…
Pourtant, au-delà de la question habituelle de la bonne gestion des fonds publics, il convient de s’interroger sur la légitimité morale de l’impôt.
Autoritaire et coercitif
Il convient d’analyser ici les implications à la fois morales et concrètes de l’imposition. La première caractéristique qu’on peut identifier concernant l’impôt, c’est sa dimension autoritaire et coercitive. En effet, il est impossible d’y échapper, impossible d’avoir un contrôle sur sa destination et celui-ci nous rend prisonnier d’un système fiscal mis en place par d’autres personnes difficiles à identifier. Cette absence de consentement individuel viole le droit de propriété que chacun a sur sa personne et sur son travail.
Sur 9 euros de salaire brut que touche un employé au SMIC, 2 euros lui sont prélevés sous forme de cotisations qui viennent assurer la survie d’un système sur lequel le contribuable n’a aucune prise et qui fait primer l’assistanat et l’irresponsabilité sur le travail. Il est intéressant de noter au passage le caractère extrêmement masqué que prend parfois l’imposition. Il est par exemple très difficile de comprendre une feuille de salaire et de comprendre la destination des différentes cotisations qu’on verse, tandis qu’on oublie parfois qu’à chaque litre d’essence qu’on achète, presque 60% sont prélevés !
L’imposition d’individus sans contrepartie directe d’un service rendu obéit donc à une logique collectiviste confiscatoire. Effectivement, ce type de raisonnement implique qu’il revient à l’État dirigé par une élite bureaucratique d’orienter la société en utilisant l’argent des citoyens, les privant ainsi du droit de jouir pleinement des fruits de leur travail.
L’état dit le « bien » et le « mal »
C’est particulièrement le cas pour les questions de morale individuelle : l’État taxe ce qu’il juge « mal » et subventionne avec les recettes des impôts ce qu’il juge « bien ». Payer un impôt consiste ainsi à être contraint à travailler une partie de son temps soit pour d’autres personnes soit pour des buts externes à notre volonté. Il s’agit donc d’une forme de travail forcé puisqu’on ne travaille ni pour soi, ni pour ceux qu’on aime ou qu’on souhaiterait aider, mais pour un système pyramidal au sein duquel les fonctionnaires de l’État et les hommes politiques décident arbitrairement de la répartition des ressources de la société.
C’est pourquoi l’impôt est fondamentalement immoral, car en niant le droit de propriété des individus, il exproprie et il asservit en réduisant en une certaine forme d’esclavage les citoyens. Par exemple, en France, les contribuables travaillent environ l’équivalent d’une demi-année pour financer les dépenses de l’État et le reste de l’année pour eux-mêmes !
En plus de l’aspect massivement confiscatoire de l’impôt, le prélèvement oblige tout le monde à adhérer et soutenir des actions politiques. Par exemple, il est impossible d’échapper au financement d’une guerre que mène l’État sous lequel on vit, quand bien même on serait opposé à son utilité, voire à l’idée même de guerre.
Favorise discrimination sociale
Enfin, l’impôt favorise l’arbitraire et la discrimination sociale. Les hommes politiques – souvent pour des raisons purement électorales – créent des catégories de bénéficiaires et dès lors des catégories de personnes lésées. Ce système de spoliation légale crée un cercle infernal de clientélisme qui aboutit à des situations aberrantes. C’est ainsi que des personnes célibataires sans enfant se retrouvent à payer pour des familles nombreuses recevant elles différents types de privilèges (allocations familiales, carte famille nombreuse…), que des personnes détestant l’art contemporain se retrouvent à payer pour financer des expositions subventionnées par l’État, que des individus ayant réussi sans faire d’études se retrouvent à payer pour des étudiants de première année d’Université qui ne paient même pas le dixième de ce que coûte leur éducation.
Parmi la multitude d’impôts et de prélèvements de toutes sortes, l’impôt sur le revenu est un excellent exemple de l’injustice de l’impôt. En effet, sous couvert de « justice sociale », cet impôt progressif détruit l’incitation à produire, récompense l’oisiveté, tout en détruisant l’idée de générosité et de solidarité naturelle. En effet, combien de personnes refusent de donner volontairement à des causes caritatives en objectant qu’ils paient assez d’impôts comme cela ?
Domaine de novlangue
Dans la novlangue façonnée par les étatistes, l’impôt serait au contraire « juste » parce que permettant d’assurer la « justice sociale » grâce aux « services publics » bénéficiant à tous. Ce serait ainsi les services publics qui rendraient l’impôt moral. Or, au-delà de leur inefficacité chronique que nous constatons tous les jours, ces services publics ne constituent rien d’autre qu’une appropriation par la coercition et le monopole de services qui pourraient être pris en charge par le secteur privé. Les retraites, par exemple, avant d’être gérées par des fonctionnaires, étaient gérées par des coopératives qui avaient au moins le souci de bien gérer les cotisations de leurs membres.
L’impôt constitue donc le bras armé de l’État permettant le pillage de la richesse de certains par d’autres. Comment cela pourrait-il être moral ?
Kevin Brookes, in Libres !, 2012
[2] Voir le Forbes Tax Misery Index.