Voici la suite de l’ouvrage « The Private Production of Defense » de Hoppe, où il entreprend de montrer qu’à l’encontre de bien des croyances se voulant libérales, l’état ne peut fournir les services régaliens dont il prend le monopole.

Dans ce second chapitre (le premier est ici), l’auteur revient sur les faits historiques empiriques pour montrer combien les évidences prétendues sont loin de se retrouver dans la réalité.


Retour sur Hobbes

Permettez-moi une pause ici dans mes considérations théoriques abstraites pour examiner brièvement les preuves empiriques sur la question. Comme indiqué au début, le mythe de la sécurité collective est aussi répandu que prégnant. Je n’ai pas connaissance d’un sondage ou étude sur cette question, mais je me risquerais à prédire que le mythe hobbesien est accepté plus ou moins sans contestation par plus de 90% de la population adulte. Cependant, croire en quelque chose ne le rend pas vrai. Plutôt, si ce que nous croyons est faux, nos actions mèneront à l’échec. Qu’en est-il donc des indices ? Vont-ils dans le sens de Hobbes et ses partisans, ou confirment-t-il à l’opposé les peurs et craintes anti-étatiques ?

Les États-Unis ont été explicitement fondés comme un état protecteur à la Hobbes. Permettez-moi de citer à cet effet la déclaration d’indépendance de Jefferson :

« We hold these truths to be self-evident: that all men are created equal; that they are endowed by their creator with inalienable rights; that among these are life, liberty, and the pursuit of happiness: that to secure these rights, governments are instituted among men, deriving their just powers from the consent of the governed. »

« Nous considérons ces vérités comme allant de soi : que tous les hommes sont créés égaux ; qu’ils sont dotés par leur créateur de droits inaliénables ; que ceux-ci comprennent la vie, la liberté et la la poursuite du bonheur ; que pour garantir ces droits, des gouvernements sont institués parmi les hommes, qui tirent leurs justes pouvoirs du consentement des gouvernés. »

Nous tenons ici notre clé : le gouvernement américain fut institué pour remplir une seule et unique tâche : la protection de la vie et de la propriété. Ainsi, il devrait fournir l’exemple parfait permettant de juger de la validité de l’affirmation hobbesienne quant au statut des États comme protecteurs. Après plus de deux siècles d’étatisme protecteur, quelle est la situation de notre protection et de la coopération humaine pacifique ? L’expérience américaine d’un étatisme protecteur est-elle un succès ?

indépendance

« We hold these truths to be self-evident: that all men are created equal; that they are endowed by their Creator with certain unalienable rights; that among… »

Bilan étatique

Selon les déclarations de nos dirigeants politiques et de leurs gardes du corps intellectuels (plus nombreux que jamais auparavant), nous serions mieux protégés et plus en sécurité que jamais. Nous sommes censés être protégés du réchauffement et refroidissement climatiques, de l’extinction des animaux et des plantes, des violences entre maris et femmes, de celles des parents et des employeurs, de la pauvreté, de la maladie, des désastres, de l’ignorance, des préjugés, du racisme, du sexisme, de l’homophobie et d’innombrables autres ennemis et dangers publics.

Les choses sont en fait fort différentes. Car afin de nous apporter tant de protection, les gestionnaires de l’État exproprient plus de 40% des revenus des producteurs privés, année après année. Dette et obligations étatiques ont augmenté sans interruption, poussant ainsi le besoin d’expropriations futures. En raison de la substitution de l’or par du papier-monnaie étatique, l’insécurité financière s’est fortement accrue, et nous sommes continuellement volés via la dépréciation monétaire. Chaque détail de la vie privée, la propriété, le commerce, et le contrat, est régi par des montagnes de lois (la législation) toujours plus nombreuses, créant ainsi une incertitude juridique permanente et un risque social sur le plan moral.

En particulier, nous avons été progressivement dépouillés du droit à l’exclusion impliqué dans le concept même de propriété. En tant que vendeurs, nous ne pouvons pas vendre à qui bon nous semble, et en tant qu’acheteurs, nous ne pouvons pas achetez à qui nous voulons. Et comme membres d’associations, nous ne sommes pas autorisés à établir quelque convention ou contrat que ce soit nous semblant être mutuellement bénéfique. En tant qu’Américains, nous devons accepter comme nos voisins des immigrants non désirés. Comme enseignants, nous ne pouvons pas nous débarrasser des élèves irrespectueux ou mal élevés. En tant qu’employeurs, nous sommes contraints à garder des employés incompétents ou nuisibles. Comme propriétaires, nous sommes obligés de supporter les mauvais locataires. En tant que banquiers et assureurs, nous ne sommes pas autorisés à éviter les risques mésestimés. En tant que restaurateurs ou barmans, nous devons faire avec les clients indésirables. Et en tant que membres d’associations privées, nous sommes obligés d’accepter des individus et des actions violant nos propres règles et conventions.

En bref, plus l’Etat a augmenté ses dépenses de sécurité sociale et de sécurité publique, plus nos droits de propriété privée ont été grignotés, plus nos biens ont été expropriés, confisqués, détruit, ou déprécié, et plus nous avons été privés du fondement même de toute protection : indépendance économique, force financière et richesse personnelle. [1] Le parcours de chaque président et pratiquement de tous les membres du Congrès est jonché de centaines de milliers sinon de millions de victimes anonymes de la ruine économique personnelle, de faillite financière, d’appauvrissement, de désespoir, d’épreuves et de frustration.

Bilan international

L’image apparaît encore plus lugubre quand on prend en compte les étrangère affaires. Jamais de toute son histoire le territoire continental des États-Unis n’a été attaqué par une armée étrangère. (Pearl Harbour fut le résultat d’une provocation américaine antérieure.) Pourtant, les États-Unis ont la particularité d’avoir eu une administration qui déclara la guerre à une grande partie de sa propre population et se lança dans le meurtre aveugle de centaines de milliers de ses propres citoyens.

preuve

Pearl Harbor, un prétexte pour Roosevelt pour entrer en guerre ?

De plus, alors que les relations entre les citoyens américains et les étrangers ne semblent pas être exceptionnellement tendues, les gouvernements des États-Unis ont, presque depuis leurs débuts, poursuivi un expansionnisme agressif sans relâche. Commençant par la guerre hispano-américaine, culminant lors des Première guerre mondiale et Seconde guerre mondiale, et se poursuivant jusqu’à présent : l’administration américaine s’est empêtrée dans des centaines de conflits étrangers et les USA ont atteint le rang de puissance impérialiste dominante mondiale.

Ainsi, presque chaque président depuis le tournant de ce siècle a aussi été responsable du meurtre, de l’assassinat, ou de la famine d’innombrables étrangers innocents partout dans le monde. En bref, alors que nous sommes devenus plus impuissants, plus appauvris, menacés et peu en sécurité, l’administration des États-Unis est devenue de plus en plus effrontée et agressive. Au nom de sa sécurité nationale, elle nous défend, équipée d’énormes stocks d’armes d’agression et de destruction massive, en harcelant toujours de nouveaux « Hitler », petits ou grands, tous soupçonnés être sympathisants hitlériens, partout et même en dehors du territoire des États-Unis. [2]

Preuve empirique ?

Les preuves empiriques semblent donc claires. La croyance en un état protecteur semble être une erreur patente, et l’expérience américaine en matière d’étatisme de protection être un échec complet. L’administration des États-Unis ne nous protège pas. Au contraire, il n’existe pas de plus grand danger pour nos vies, nos biens et notre prospérité que l’administration des États-Unis et le président des États-Unis en particulier est au monde le danger armé le plus menaçant, capable de ruiner quiconque s’oppose à lui et de détruire le globe entier.

 

Hans-Hermann Hoppe

[1] See Hans-Hermann Hoppe, “Where The Right Goes Wrong,” Rothbard-Rockwell Report 8, no. 4 (1997).

[2] See John Denson, ed., The Costs of War (New Brunswick, N.J.: Transaction Publishers, 1997).