« Si la jalousie, l’envie et la haine pouvaient être éliminées de l’univers, le socialisme disparaîtrait le même jour. » – Gustave Le Bon

Enfantillages

Qui n’a jamais assisté, ou même participé, lors d’une dégustation de galette des rois en présence de plusieurs enfants, à ce genre de stratagème : repérer l’emplacement des fèves et s’arranger, au fur et à mesure de plusieurs distributions, pour que chaque enfant en récolte une ?

Tout ceci afin d’éviter les crises de larmes : « C’est pas juste. Pourquoi lui, et pas moi ?! »

Ces jalousies puériles ne sont toutefois pas sans racine : rien ne semble justifier que le hasard attribue la fève à l’un plutôt qu’à l’autre, si ce n’est justement ce hasard si énigmatique. Or, sans explication admise, le sentiment d’injustice face à cette inégalité est fréquent. Et c’est bien d’inégalité dont il est question ici. En effet, la revendication n’est pas d’obtenir une fève de plus que l’autre. Non : il suffit que chaque enfant ait sa fève pour que les esprits s’apaisent.

Fort heureusement, en grandissant, toutes ces précautions autour d’une galette sont rendues inutiles. Les adultes apprennent à maîtriser leur jalousie contre cette cruelle réalité : les hasards de la vie sont arbitraires et provoquent des inégalités. Mais dans la plupart des cas, la jalousie est-elle vraiment maîtrisée ? N’est-ce pas plutôt le fait qu’une fève en argile et une couronne en carton doré ne représentent plus guère de richesse suffisamment enviable pour susciter de la jalousie ?

Jalousie

Jalousie des étatistes, nuage des mots de l’article.

À société enfantine, jalousie enfantine

La question mérite d’être posée, tant la jalousie supposée enfantine peut rejaillir dès qu’une richesse obtenue est plus importante. Les inégalités dues à une naissance ou un héritage par exemple, peuvent provoquer ainsi le même sentiment d’inégalité et donc d’injustice.

Et même lorsque ces inégalités font suite, non à de la chance, mais à du mérite, la jalousie peut devenir plus forte encore. Pour la simple raison que le mérite de l’un peut renvoyer, par opposition, au laxisme de l’autre. Pire alors que d’en vouloir au ciel, accusation bien confortable finalement, il s’agit de s’en vouloir à soi-même, ce qui est bien plus difficile à assumer. Dans une société enfantine, on oublie les raisons pour ne plus voir que la différence.

Mais qu’il soit question de chance ou de mérite, la jalousie des inégalités trouve toujours sa – fausse – réponse dans la recherche de l’égalité. Les lois dites de « justice sociale » visent justement à la rétablir par un moyen simple, enfantin : prendre l’argent là où il est, pour le reverser là où il manque (via impôt sur le revenu, capital, bénéfice, héritage…) avec parfois même l’obligation de payer un service, de façon à ce que tout le monde soit logé à la même enseigne (tels sécurité sociale, éducation nationale, retraite, chômage…). Ces lois sont en fait autant d’atteintes à la liberté de disposer ou d’agir selon ses biens propres.

Démasquer la jalousie cachée

Mais ceux qui défendent ces interventions de l’État pour lutter contre les inégalités, avouent très difficilement être motivés par la jalousie. Le dicton populaire nous le rappelle suffisamment : « la jalousie est un vilain défaut ». Qui serait prêt alors à s’avouer jaloux ?

S’il paraît donc vain ici d’espérer faire admettre la jalousie, en vue de l’abandonner, il peut être plus utile de souligner les incohérences des arguments utilisés qui tentent de la dissimuler.

Ainsi, un de ces arguments souvent évoqué est celui de la solidarité, sentiment paraissant bien plus vertueux en soi, puisqu’il s’agit de justifier les prélèvements sociaux pour en faire profiter les plus démunis.

Il est alors intéressant de reprendre la définition de la Solidarité et remarquer qu’il s’agit d’une forme de générosité. Cette générosité est certes intéressée, ce qui la distingue de l’altruisme, mais il s’agit pourtant d’une forme de générosité. Or, un acte généreux perd tout son sens sitôt qu’il est imposé. Ainsi, de la même façon qu’une personne contrainte de donner, ne peut être considérée généreuse, un impôt qui est, par sa définition même, imposé, ne peut pas être qualifié de généreux. Parler « d’impôt de solidarité » représente donc bien un contre-sens.

Aussi, il est important de réaliser qu’un impôt est un vol avec usage de violence. À ceux que le terme de « vol » choque et pour qui la violence n’est pas toujours identifiée, je laisse imaginer le sort que réserverait le gouvernement à un contribuable s’opposant aux prélèvements de ses impôts. Pire encore que l’usage de la force pour le contraindre à franchir la porte de la prison : masqué, le prélèvement à la source, par les charges ou taxes, tue dans l’œuf toute résistance !

Cependant, parfois, certaines personnes revendiquent tout de même leur générosité en prétextant une disposition volontaire à payer leur impôt. Je n’ai, pour autant, jamais rencontré une seule de ces personnes déclarer, ne serait-ce qu’un seul euro supplémentaire sur son avis d’imposition. À croire que leur générosité correspondait toujours miraculeusement, parfaitement à la somme exigée, au centime près ! … Mais passons.

Admettons même la nécessité des impôts, ne pouvant pas compter sur la seule générosité trop insuffisante. Pourquoi alors cautionner des tranches d’impôt telles que les plus riches payent un pourcentage plus élevé d’impôts ? N’est-ce pas encore et toujours par jalousie de leur richesse ? Une richesse, parfois même qualifiée « d’indécente », devenant inadmissible au-delà d’un certain niveau, indépendamment du moyen de l’obtenir, aussi louable soit-il.

Quant aux personnes qui défendent les impôts pour les services dont ils peuvent profiter sur le principe d’une assurance à échelle nationale (cas de la sécurité sociale par exemple), il suffit de leur vanter un système similaire d’assurance, mais privée, pour qu’ils en reviennent aussitôt à la solidarité. Jalousie des droits acquis à préserver… jalousement ?

Lutter contre des inégalités n’a rien de répréhensible en soi. Mais utiliser des lois liberticides qui sont en fait motivées par la seule jalousie ne peut être légitimement défendu.

Libres !!

Couverture de Libres !!

 

Grégory Bodylski, in Libres !!, 2014